Rencontre avec Bénédicte Nemo

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A l’occasion de la semaine du livre de jeunesse de la médiathèque La Licorne, les classes de 6e du collège ont rencontré le 14 et 15 octobre derniers l’illustratrice Bénédicte Némo.

A quel âge avez-vous commencé à illustrer ?

J’ai commencé à illustrer en 1997 à 23 ans. Mon tout premier travail d’illustratrice a été un livre de coloriage pour enfants (!)

Quelles études avez-vous suivi pour faire ce métier ?

J’ai fait un Bac S au Sénégal puis je suis rentrée en France pour continuer mes études. J’ai fait une année de Prépa pour intégrer une école de dessin. Ensuite j’ai passé les concours pour rentrer à l’école d’Arts déco et l’école d’arts visuels à Paris. J’ai choisi l’école d’Arts déco où j’ai passé 6 ans à faire du dessin.

Combien de livres avez-vous illustrés ?

J’ai illustré une trentaine de livres. Quand je suis revenue d’Afrique j’ai fait un carnet de voyage sur le Sénégal. Donc j’ai commencé par illustrer des documentaires sur différents pays ressemblant à des carnets de voyage. J’en ai fait onze dans la collection Grandir.

Ensuite mon premier album illustré a été Tom Pouce chez Flammarion. Quand je le regarde aujourd’hui je ne suis pas satisfaite. Ça a été une expérience douloureuse pour moi car je n’avais aucune liberté sur la manière de l’illustrer. C’est pour cette raison que je ne l’apprécie pas.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ce métier ?

Je fais ce métier pour l’amour du dessin. Dès l’âge de 6 ans je rêvais de devenir illustratrice. C’était un rêve d’enfant même si à un moment donné j’étais attirée par le métier de vétérinaire car j’adore la nature, les animaux. J’aurais aussi adoré être illustratrice scientifique. Partir avec des expéditions à la découverte de nouvelles espèces…

Quelles sont vos inspirations ?

Mes grands parents étaient collectionneurs d’estampes japonaises. L’art africain de par mes années passées au Sénégal et l’art des estampes ont influencé mon travail. Mes parents eux étaient collectionneurs de BD. Il y avait une collection de plus de 200 BD à la maison que mes parents prêtaient aux amis et voisins. On tenait un registre de prêt comme dans une bibliothèque. A l’époque au Sénégal l’accès aux livres et en particulier aux BD était difficile. La lecture de BD m’a amenée vers des horizons différents. Mais la BD n’est pas mon univers à moi même si j’ai grandi avec ses lectures. Je n’aurais pas pu devenir illustratrice de BD car je n’aime pas vraiment redessiner les mêmes personnages, les mêmes décors : je préfère créer des illustrations totalement différentes à chaque page. Je ne sais pas faire des dessins stylisés, humoristiques cela ne me convient pas.

Quel est votre auteur (ou illustrateur) préféré ?

J’adore Gilles Bachelet. Je trouve ses albums très drôles. Ce que je ne sais pas faire !

Quelles techniques utilisez-vous pour faire vos illustrations ?

Lorsque j’illustre un album je commence par faire le crayonné à partir du texte. Ensuite je mets la couleur. Je peux ajuster les tons sur ordinateur. Je préfère peindre à l’acrylique, parce que je peux superposer les couleurs. C’est une peinture qui se travaille facilement et qui sèche vite. Et j’aime travailler vite.

Pour mes albums j’aime varier de techniques, me surprendre. Par exemple pour certains albums comme Paris Paradis j’ai utilisé la technique de la linogravure. Il s’agit d’une feuille de lino que l’on creuse avec une sorte de gouge pour créer l’illustration en creux, une sorte de tampon sur lequel on va appliquer de l’encre. Pour cet album je me suis inspirée des peintures publicitaires murales que l’on trouve au Sénégal où les contours sont très épais.

Combien de temps faut-il pour illustrer un livre ?

Il y a des livres que j’ai illustrés très rapidement comme le 7e roi parce que le texte m’a inspirée. Pour d’autres ça a été plus long. Il m’est déjà arrivée de refuser un texte parce qu’il ne me parlait pas. Je me documente beaucoup avant d’illustrer un album pour les décors, l’ambiance. Par exemple pour le Lion de pierre l’histoire de déroule au Tibet. Je ne suis jamais allée là-bas alors j’ai fait des recherches dans les livres, sur internet. Il faut en moyenne 8 mois pour illustrer un album.

Quel est le livre qui a eu le plus de succès ?

L’album qui a eu le plus de succès est le lion qui a perdu sa crinière : il a été réimprimé trois fois.

Quel est votre livre préféré ?

En ce moment mon livre préféré est le dernier que j’ai fait : Selfies pour la planète. Quand je publie un album je considère qu’il ne m’appartiens plus mais au lecteur. Je m’en détache.

Quel est votre rêve en tant qu’illustratrice ?

Mon rêve en tant qu’illustratrice est simple : c’est de pouvoir vivre de mon travail, continuer à faire ce métier. En parallèle de mon métier d’illustratrice je fais d’autres activités car mon activité d’illustratrice n’est pas suffisamment rémunérée. Sur un album je touche environ 3 % du prix de vente. Je fais du graphisme, j’ai fait récemment le packaging d’une brique de lait. Et en ce moment je suis enseignante en arts appliqués dans un lycée à Paris.

Aimez-vous rencontrer vos lecteurs ?

J’aime beaucoup rencontrer des lecteurs. C’est un moment très inspirant pour moi. Quand on fait ce métier on est souvent seule chez soi. Vous rencontrer c’est une justification à mon travail, à mon métier. C’est pour vous que je fais ces illustrations. Je m’inquiète de voir qu’aujourd’hui les jeunes, dont mon fils, lisent de moins en moins, davantage attirés par leur portable. Donc c’est un réconfort pour moi.